Dans le cadre de notre voyage, nous avons proposé à la proviseure du Lycée International Alexandre Dumas (LIAD), Chantal Lévy, de mener quatre ateliers de médiation par l’objet sur le même modèle que celui que nous avions organisé en juin à la MC93 à Bobigny.
Le principe ? Chacun des participants apporte un objet lié à son héritage familial et aborde à travers ce prisme son histoire personnelle.
Là où en France, il y a un contexte de déficit de connaissances historiques lié à une absence d’apprentissage de l’histoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, en Algérie c’est tout l’inverse, cette histoire est au programme d’histoire tous les ans. Nous étions donc forcément curieux de l’accueil qui allait nous être fait et de savoir si le format de cet atelier serait vraiment adapté.
Dès le premier atelier, on entend de la part des lycéens : « La guerre d’indépendance, c’est tous les ans ! Ils ajoutent deux ou trois nouvelles dates pour nous faire croire que c’est un nouveau chapitre mais en réalité c’est exactement la même chose ! »
Alors nous leur avons demandé : « pourquoi venir à l’atelier ? »
« L’objet sert à transmettre, même s’il n’a pas de valeur. Ce n’est pas l’objet qui compte mais l’histoire derrière. » nous répond un élève.
Tout l’intérêt de ce format a été de créer un espace d’échanges pour faire dialoguer histoire intime, personnelle et histoire avec un grand H. Confronter la version officielle de l’histoire avec des fragments de vie transmis de génération en génération.
Les élèves ont partagé avec nous, non seulement des récits bouleversants, mais aussi des objets plus puissants, émouvants les uns que les autres. Une lettre issue d’une correspondance avec Simone de Beauvoir et Camus, des médailles, un fourreau d’épée, des photographies, un journal, et bien d’autres…
Nous avons été très honorés de la confiance qui nous a été faite et les échanges qui en ont découlé nous ont permis d’enrichir considérablement notre vision. Les jeunes sont tellement enthousiastes que certains reviennent aux ateliers du lendemain !
Très vite la question du musée est abordée.
« Cette médaille n’a pas sa place chez moi, mais dans un musée. A la maison cette médaille est cachée au fond d’un tiroir » nous dit Wassim.
La présence d’objets avec tant de valeur symbolique dans un espace domestique est écrasante. L’idée d’un lieu culturel qui puisse accueillir ces objets et faire le lien entre écriture de la « grande » histoire et héritages familiaux fait sens.
Tous ces témoignages, ces objets, sont autant de preuves que si un musée des relations entre France et Algérie voit le jour, ce lieu doit être une émanation de la société civile et l’endroit où se mêle l’intime au politique.